Gustave Cotteau
17 Décembre 1818 - 10 Août 1894
(héliogravure Dujardin)
C'est avec une profonde douleur que le
monde savant apprenait, le 10 août 1894, la mort de Gustave Cotteau. Doué
d'une constitution robuste, il était plein de vie encore, malgré ses 75
ans, lorsqu'un mal aussi imprévu que rapide dans ses effets le coucha pour
jamais dans la tombe. En quelques minutes, il avait été terrassé. Sur son
cercueil, des voix amies ont retracé sa noble vie, toute pleine d'honneur
et de travail. Sa ville natale, Auxerre, lui a fait des funérailles
splendides, et, si nous en croyons le témoignage non douteux de la presse
locale, sa fin inattendue souleva dans la population d'unanimes regrets.
Accueillant et bon, généreux, travailleur infatigable, il avait conquis
l'affection de tous ses concitoyens. Sa vie avait été un exemple, sa mort
fut un deuil public.
Gustave Cotteau était membre correspondant
de notre Société depuis le 1er septembre 1858. Vous m'avez confié la
mission de vous retracer en quelques lignes les principaux traits de cette
vie si laborieusement employée pour le plus grand profit de la science. Je
suis heureux du choix que vous avez fait en me désignant, car je tiens que
c'est un grand honneur pour moi d'avoir à vous parler d'un homme si
universellement aimé et estimé, d'un savant donc les travaux considérables
ont jeté un si vif éclat sur la science française. Malheureusement, je
n'ai pas eu la bonne fortune de connaître personnellement M. Cotteau. Et
cependant j'ai le souvenir lointain de l'avoir aperçu, en 1878, dans une
excursion à Grignon, organisée par l'Association française pour
l'avancement des sciences, lors du 1er Congrès de Paris. Il était là,
entouré d'amis et de hautes personnalités scientifiques. Je dus me tenir
modestement à l'écart ; mais, comme son nom m'était bien connu, j'écoutai
avidement ses paroles et je pus apprécier la finesse de son esprit et le
charme de sa conversation, pendant les rapides instants que je passai dans
sa compagnie. J'en conservai un agréable souvenir. Et, plus tard,
lorsqu'il entreprit dans la "Paléontologie française" la publication des
Echinides éocènes, ce fut avec un véritable bonheur que je lui
communiquai, sur sa demande, tous les Echinides que j'avais recueillis
dans le Sud-Ouest. A partir de ce moment, des relations s'établirent entre
nous par correspondance, et c'est, depuis cet instant, que j'ai pu
apprécier à leur juste valeur aussi bien les qualités personnelles de
l'homme du monde que celles du savant que nous avions le grand honneur de
compter au nombre de nos membres correspondants.
C'est à ce double point de vue que je veux
vous parles de G. Cotteau, ne sachant trop ce qu'on doit le plus louer en
lui ou des qualités de son coeur, de son urbanité, de sa complaisance
inépuisable, ou des dons heureux de son esprit, de la vivacité de son
intelligence, de sa puissance de travail.
Gustave Cotteau était né à Auxerre le 17
décembre 1818. Au collège d'Auxerre, il se prépara par de fortes études à
la lutte pour la vie, et, comme ses parents le destinaient à la
magistrature, il le firent inscrire comme étudiant à la Faculté de droit
de Paris. C'est, dès cette époque, que Gustave Cotteau se sentit entrainé
par ses goûts vers l'étude de l'histoire naturelle, et surtout vers la
Géologie et la Paléontologie. Dès l'année 1839, avant même d'avoir conquis
le grade de licencié en droit, il était reçu membre de la Société
géologique de France. Là, il se trouva en contact avec des savants tels
que Constant Prévost, Elie de Beaumont, Brongniart, Alcide d'Orbigny, d'Archiac,
qui exercèrent sur le jeune néophyte l'influence de leur grand talent. il
sentit la nécessité d'étudier pour comprendre les discussions
scientifiques auxquelles se livraient devant lui les grands maîtres que
j'ai nommés ; et, c'est ainsi que peu à peu il se préparait à devenir à
son tour l'un des chers de la science à laquelle il s'était voué.
Il n'avait cependant pas négligé ses études
de droit. En 1840, il était reçu licencié et, en 1846, nommé juge
suppléant près le tribunal d'Auxerre. Plus tard, il fut nommé juge au
tribunal de Coulommiers, et, en 1862, juge à Auxerre. Il conserva ces
fonctions jusqu'en 1872, époque à laquelle il donna sa démission, pour se
consacrer exclusivement à la science. Il ne resta attaché à la
magistrature que par les liens de l'honorariat.
Ce n'est pas là qu'était d'ailleurs sa
véritable vocation. Dans les années qui avaient précédé son entrée dans la
magistrature et dans celles qui l'avaient suivie, il s'était livré avec
ardeur à l'étude géologique du département de l'Yonne, tant au point de
vue stratigraphique qu'au point de vue paléontologique, recueillant dès
lors les nombreux matériaux qui lui permirent plus tard de rédiger les
importants mémoires qu'il devait publier sur ce département. C'est de
cette époque que datent aussi ses premières publications qui eurent pour
objet l'étude des couches oxfordiennes aux environs de Chatel-Censoir-1884)
et de la position que le terrain aptien de l'Yonne occupe dans la série
crétacée (1844). En 1847, il faisait paraître dans le Bulletin de la
Société des sciences historiques et naturelles de l'Yonne qui venait de se
créer et dont il était l'un des membre fondateurs, d'abord un "Aperçu
sur la géologie du département de l'Yonne", puis une "Note sur le
Dysaster Michelini".
Par ce dernier travail, il débutait dans
l'étude de l'Echinologie à laquelle désormais il allait consacrer presque
toutes les forces de son intelligence et la meilleure partie de sa
remarquable puissance de travail. Dès lors, se succédèrent, presque sans
interruption, ces mémoires si nombreux et si consciencieusement écrits qui
ont pour objet l'étude des Echinides et qui devaient soulever autour de
son nom une si juste notoriété. Le premier travail important qu'il publia
fut ses "Etudes sur les Echinides fossiles du département de l'Yonne"
dont le premier volume parut en 1856, œuvre qui fut bientôt suivie (1857)
de la publication des "Echinides du département de la Sarthe,
considérés au point de vue zoologique et stratigraphique", en
collaboration avec M. Triger. Un atlas de 75 planches accompagnait ce
dernier mémoire. G. Cotteau en avait préparé et rédigé toute la partie
paléontologique, laissant à son collaborateur la partie stratigraphique de
l'oeuvre.
Dans une notice biographique lue devant la
Société géologique de France et devant la Société dR2es sciences
historiques et naturelles de l'Yonne, M. A. Péron, un ami de G. Cotteau,
qui a su trouver des accents chaleureux et éloquents pour retracer sa vie,
dit que ces premiers travaux suffirent pour établir, dès ce moment, la
réputation de G. Cotteau comme échinologiste. Il ajoute que, dès 1853,
Desor lui écrivait : "ce n'est certes pas une flatterie de vous dire que
pour s'occuper d'une manière sérieuse et avec fruit de l'étude des
oursins, il est indispensable de vous connaître et de vous étudier. Voici
bien des mois que votre ouvrage est sur ma table, à côté de moi, en
compagnie de ceux de MM. Forbes, Gras, Quenstedt, etc., et il ne se passe
pas de jour que je ne vous consulte".
Cette réputation était en effet si bien
conquise, dès ce moment, que, peu d'années parès, lorsque Alcide d'Orbigny
fut mort, l'éditeur m. Masson, qui s'était rendu acquéreur de la "Paléontologie
française", chargea G. Cotteau de l'achèvement du volume des Echinides
crétacés irréguliers, dont la mort d'Alcide d'Orbigny avait interrompu la
publication. C'est aussi à cette époque que G. Cotteau fut appelé à faire
partie du Comité de spécialistes, tous les membres de la Société
géologique de France, qui fut constitué pour continuer l'oeuvre de
d'Orbigny. Si c'était pour lui un grand honneur, c'était surtout un
hommage précieux rendu à sa haute érudition.
Les années qui suivirent furent pour notre
collègue celles du labeur le plus assidu, de la persévérance la plus
tenace dans l'accomplissement de l'oeuvre qu'il avait entreprise. Sant
oublier ses devoirs de magistrat, sans négliger les nombreuses sociétés
scientifiques dont il faisait partie et auxquelles il avait toujours
quelques notes ou mémoires à envoyer, il s'attela courageusement à la rude
besogne qui lui avait été confiée et il contribua pour une bonne part à
l'édification de ce monument scientifique glorieux pour notre pays qui a
nom la "Paléontologie française".
Après avoir achevé la publication des
Echinides créacés irréguliers (01859), il faisait paraître, de 1862 à
1867, les Echinides crétacés réguliers en un volume, avec un atlas
de 200 planches ; puis, de 1867 à 1885, les Echinides jurassiques
réguliers et irréguliers, en 3 volumes, avec 518 planches ; et, enfin,
de 1885 à 1894, les Echinides éocènes, en deux volumes de texte,
avec un atlas de 384 planches.
Pour achever cette colossale monographie,
il ne restait plus à publier que les Echinides miocènes et pliocènes.
Malgré le poids des années, G. Cotteau se sentait le courage d'apporter à
son oeuvre ce couronnement. Sa verte vieillesse semblait lui promettre
encore de longs jours. Il s'était mis résolument au travail. De toutes les
parties de la France, il avait reçu de ses correspondants les documents
nécessaires à son entreprise, des notes avaient été rassemblées, la
première livraison était composée et tirée en épreuves, les planches
étaient préparées, mais la mort vint arrêter dans son labeur cet
infatigable travailleur !
Hélas ! pourquoi la Providence n'a-t-elle
pas voulu qu'il ait eu le temps d'achever cette immense monographie qui
restera néanmoins, quelqu'incomplète qu'elle soit, l'une des productions
les plus éminentes de la science française. Elle honore notre pays, mais
elle honore surtout celui qui en est l'auteur. Il lui a consacré plus de
trente années de sa vie.
C'est son oeuvre capitale, celle qui
atteste avec le plus de vigueur la force de son intelligence, la ténacité
de son travail, la sagacité de son esprit. Quant à ses résultats
pratiques, en les constatant, on a pu dire avec raison que "la classe des
Echinides, l'une des plus ignorées jusque-là, est actuellement l'une des
mieux connues et l'une de celles qui rendent le plus de services à la
géologie."
Ne croyez pas cependant que, malgré les
patientes recherches qu'exigeait un semblable travail, malgré les lenteurs
de sa préparation et les difficultés de son exécution, G. Cotteau lui ait
sacrifié tout son temps. Son activité incessante suffisait à tout. Membre
de plus de 20 sociétés savantes, il trouvait encore le loisir nécessaire
pour rédiger d'autres mémoires qu'il leur adressait ; pour assister, tous
les ans, aux grandes réunions scientifiques de la France et de l'étranger,
notamment aux Congrès de l'Association française pour l'avancement des
sciences dont il était l'âme dans la section de géologie ; pour rédiger
dans des rapports clairement écrits et d'un style alerte, les comptes
rendus de ces Congrès qu'il lisait chaque année devant la Société des
sciences historiques et naturelles de l'Yonne ; pour entreprendre aussi de
grands voyages à travers toutes les capitales de l'Europe, en visiter les
musées, en rapporter des notes et des documents dont son heureuse activité
savait trouver l'emploi.
Je ne puis citer dans cette courte Notice
tous les travaux de G. Cotteau. Si vous êtes curieux d'en lire les titres,
vous pourrez les trouver dans une "Notice sur les travaux scientifiques
de M. Cotteau" que lui-même avait écrite, et dont il avait fait
hommage à notre bibliothèque, il y a quelques années. Vous les trouveriez
aussi cités plus complètement encore dans la Notice biographique de M. A.
Péron, parue dans le Bulletin de la Société des sciences historiques et
naturelles de l'Yonne (1er semestre 1895) que notre bibliothèque possède
aussi. Leur énumération ne contient pas moins de 168 numéros.
Pour vous donner une idée de ce labeur
immense et de la haute valeur de l'oeuvre de G. Cotteau, permettez-moi de
citer ici un passage d'un rapport que M. Albert Gaudry adressait à
l'Académie des sciences, le 23 février 1884. Sur ce rapport, l'Académie
confirmant le choix de ses commissaires, MM. Hébert, de Quatrefages, H.
Milne-Edwards, A. Gaudry, décernait à G. Cotteau, le prix Vaillant : "Bien
que la paléontologie, disait le rapporteur, soit une science toute
nouvelle, la multitude des êtres fossiles actuellement découverts commence
à être si grande qu'il est difficile à un même homme d'un embrasser
l'ensemble. Les paléontologistes sont obligés de devenir des spécialistes
; ils choisissent soit une fraction des temps géologiques, soit un groupe
du monde animal. M. G. Cotteau s'est attaché au groupe des Echinodermes et
il a acquis dans l'étude de ces animaux une habileté universellement
reconnue. Notre correspondant suédois, M. Lovén, qui est la plus haute
autorité dans les questions relatives aux Echinodermes, vient d'écrire ces
mots dans son mémoire On Pourtalesia : "Les ouvrages de M. Cotteau,
dans la Paléontologie française et ailleurs, sont tous des modèles
de recherche et d'élucidation qui n'ont pas été surpassés". M. Cotteau a
fait paraître deux volumes sur les Echinides de la Sarthe, un volume sur
les Echinides su sud-ouest de la France, deux volumes sur les Echinides de
l'Algérie (en collaboration avec MM. Péron et Gauthier), plusieurs volumes
dans la Paléontologie française, des mémoires sur les Echinides
fossiles de la Belgique, de l'Yonne, de la Normandie, de Cuba, des îles
Barthélemy et Anguilla (Antilles), de Stramberg (Monts Karpathes), etc. Il
a publié plus de mille planches d'Echinodermes ayant en moyenne au moins
douze figures, ce qui fait un total de douze mille figures ; cela
représente un travail immense. Il a décrit une multitude de formes
fossiles qui étaient inconnues avant lui, notamment le curieux
Tetracidaris, qui, par ses interambulacres composés de quatre rangées
de plaques, rappelle, jusque dans le crétacé inférieur, la conformation
des paléchinides primaires. Comme le squelette des Echinodermes est
compliqué et bien défini, il offre d'excellents caractères pour distinguer
les espèces fossiles : ainsi les espèces de Cidaris, Salenia,
Disaster, Micraster, Hemiaster, Echinobrissus,
et bien d'autres Echinodermes, occupent une place importante parmi les
fossiles caractéristiques des étages géologiques. Il résulte de là que les
publications de M. Cotteau sont d'une grande utilité pour la
stratigraphie. Les services que ce paléontologiste a rendus, depuis trente
ans, lui ont mérité l'estime et la reconnaissance de tous les géologues.
La commission du prix Vaillant est unanime
pour décerner un premier prix de 2.500 francs à M. G. Cotteau".
Nous pouvons ajouter que G. Cotteau a aussi
publié, sans compter des fascicules annuels sur les Oursins nouveaux ou
peu connus, des monographies spéciales sur les Oursins de l'Aube, de
la Haute-Marne, de la Haute-Saône, des Bouches-du-Rhône, de l'Ardèche, de
la Lorraine, des Corbières, des Pyrénées, de la Corse, etc., etc. Parmi
ces monographies, il en est une que je cite spécialement, c'est la "Description
de quelques Echinides tertiaires des environs de Bordeaux" parue dans
le XXVIIe vol. de nos Actes et accompagnée de deux planches. Dans
ceztte Note, G. Cotteau a décrity et figuré six espèces d'Echinodermes
rares, provenant l'une du calcaire éocène de Blaye, les cinq autres du
calcaire à astéries.
Le labeur de G. Cotteau a donc été immense
et c'est avec une juste raison qu'en lui décernant le prix Vaillant,
l'Académie des sciences récompensait toute une vie de travail et de
dévouement à la science. Les marques d'estime et les honneurs n'ont du
reste pas manqué à G. Cotteau. Et, comme l'a dit avec raison son ami M.
Péron : "S'il a beaucoup travaillé, il a aussi beaucoup connu les joies du
succès et le bonheur de voir le produit de son travail apprécié à sa juste
valeur."
En 1858, il fut nommé correspondant du
ministère de l'Instruction publique.
Aux réunions des délégués des Sociétés
savantes, à la Sorbonne, il obtint : en 1861, une médaille de bronze ; en
1863, une médaille d'argent ; en 1867, une médaille d'or.
En 1864, il fut nommé officier d'académie ;
en 1876, officier de l'instruction publique.
En 1869, il avait été fait chevalier de la
Légion d'honneur et, en 1882, nommé conservateur du Musée de la ville
d'Auxerre.
En 1885, une médaille d'honneur lui avait
été décernée par la Société libre pour le développement de l'instruction
et de l'éducation populaire, pour ses travaux d'anthropologie et
d'archéologie, car la géologie et la paléontologie ne l'absorbaient pas
exclusivement. Son énorme activité se dépensait en toutes sortes de
travaux et il aimait toutes les sciences.
En 1887, l'Académie des sciences l'avait
nommé membre correspondant pour la section d'anatomie et de zoologie ; en
1891, il avait été élu, en remplacement d'Hébert, membre étranger de la
Société géologique de Londres, honneur très recherché et rarement obtenu ;
en 1893, l'Académie de Dijon lui avait décerné une médaille d'or, la plus
haute récompense dont elle pouvait disposer.
Il avait eu l'honneur d'être nommé deux
fois, en 1874, et en 1886, président de la Société géologique de France,
dont il a été membre plus de 54 ans ; il fut aussi président de la Société
zoologique de France, pour l'année 1889 ; enfin, il présida, depuis 1883
jusqu'à sa mort, la Société des sciences historiques et naturelles de
l'Yonne, pour laquelle il réservait la meilleure part de son activité et
de son dévouement.
Tous ses mémoires sont écrits avec clarté,
précision et méthode : "Dans tous mes travaux sur les Echinides, a-t-il
dit, je me suis constamment préoccupé, d'abord, de bien faire connaître
l'espèce par une synonymie complète, par une description détaillée et par
des figures reproduisant, avec des grossissements plus ou moins forts,
tous les organes essentiels, puis ensuite de déterminer la position
stratigraphique de l'espèce et les localités où elle a été rencontrée ;
j'ai toujours recherché avec le plus grand soin si on peut la considérer
comme caractéristique, c'est-à-dire si elle se cantonne à un horizon qui
lui est propre, ou si elle en franchit les limites. Mieux que d'autres
animaux, dont on retrouve les débris dans les couches du sol, les
Echinides se prêtent à ce double genre d'études. Leur test n'est pas
seulement, comme chez les mollusques, une simple enveloppe. Ainsi qu'on
l'a constaté depuis longtemps, c'est un véritable squelette à la surface
duquel se reproduisent, avec les détails les plus compliquées, les
principaux organes de l'animal : les plaques ocellaires et oviducales, les
pores ambulacraires, le péristome, le périprocte, toujours si variés dans
leur arrangement et leur structure, ne sont autre chose que la
manifestation extérieure des organes de la vue, de la génération, de la
respiration, de la nutrition, de la digestion".
C'est par l'étude attentive et méticuleuse
de tous ces caractères que G. Cotteau est devenu l'un des maîtres les plus
appréciés de l'Echinologie. C'est à la méthode scrupuleuse qu'il a suivie
que tous ses travaux doivent leur incontestable autorité.
Voilà ce que fut le savant. Pour compléter
cette Notice, il me reste à vous dire quelques mots de l'homme.
G. Cotteau était de ceux qui, doués de
facultés heureuses, attirent et retiennent. Au cours de sa vie, il sut
contracter de solides amitiés ; tous ceux qui eurent le bonheur de
l'approcher, lui vouèrent leur affection et leur estime. Favorisé de la
fortune, il était bon et généreux pour les pauvres, plein d'aménité et de
bienveillance pour tous ceux que les circonstances mettaient en rapport
avec lui. Sa complaisance était inépuisable ; elle se dépensait largement.
Jamais on ne faisait en vain appel à ses lumières et je ne sais trop
vraiment ce qu'il y avait en lui de plus remarquable ou de la sûreté et de
la précision de son esprit scientifique, de son enthousiasme et de son
dévouement à la
science ou de sa profonde honnêteté, de son
caractère affable et facile, de sa constante bonne humeur. Au dire de ceux
qui ont vécu dans son intimité, c'était une physionomie charmante, toute
pleine d'attrait et de séduction. Sa parole était facile, son élocution
persuasive, sa plume alerte et prompte.
Il avait rassemblé des collections de toute
espèce, riches et précieuses : de géologie, de paléontologie,
d'archéologie, de céramique. Celle d'Echinodermes vivants et fossiles est
unique au monde : elle ne contient pas moins de dix mille exemplaires. Il
y a lieu de se féliciter que, dans sa sollicitude pour les intérêts de la
science, il ait eu la pensée de la léguer à l'Ecole des Mines où elle sera
précieusement conservée.
La mort de G. Cotteau laisse un grand vide,
mais son oeuvre restera impérissable. Elle gardera son nom de l'oubli. Du
savant on dira que sa vie de labeur fut un exemple et que son oeuvre
constitue l'un des plus précieux monuments de la science française. Et de
l'homme on dira qu'il fut l'une des personnalités les plus hautes, les
plus séduisantes, les plus aimables dont on puisse conserver le souvenir !
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