N O T IC E
B I O G R A P H I Q U E
de
Gustave COTTEAU
par A. PERON
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I
Vers le milieu du moins d'août dernier,
alors que le monde géologique était en travail et en fêtes et que trois
grandes réunions scientifiques, le congrès de l'association française à
Caen, la session extraordinaire de la Société géologique à Lyon et le
congrès international de géologie à Zurich, attiraient et dispersaient
tous les géologues, une nouvelle aussi douloureuse qu'inattendue, publiée
par tous les journaux, se répandit subitement et vint porter le deuil au
milieu de ces réunions. Gustave Cotteau, que l'on y attendait, venait,
disait-on, de mourir, emporté en quelques instants par une maladie
foudroyante.
Cette nouvelle, hélas ! n'était que trop
vraie. Notre éminent confrère, auquel sa robuste constitution et sa verte
vieillesse semblaient encore promettre de longs jours, avait été
subitement frappé par une congestion cérébrale, alors qu'il était en
traitement pour une affection tout accidentelle qui ne pouvait en aucune
façon faire présager une issue fatale.
La mort si imprévue de Gustave Cotteau a
été en effet précédée d'un accident qui, s'il n'en a pas été la cause
efficiente et immédiate, en a été du moins la case indirecte.
C'était le 11 juillet de l'année dernière.
Cotteau avait un rendez-vous au restaurant Foyot, où il devait déjeuner
avec nos confrère, MM. Douvillé et de Morgan. En entrant dans le
vestibule, il glissa sur une plaque de fonte et fit, pour se retenir, un
violent effort dans lequel il se déboîté la rotule.
On courut, sur sa demande, chercher son
ami, notre confrère, le docteur Besançon, qui demeure non loin du
restaurant Foyot, et, péniblement, Cotteau fut ramené en voiture à son
domicile du boulevard Saint-Germain où, immédiatement, le Dr Besançon put
remboîter l'articulation.
Dès le lendemain, reconnaissant
l'impossibilité de se faire soigner convenablement dans le simple
pied-à-terre qu'il avait à Paris, Cotteau se fit transporter à la maison
de santé des Frères Saint-Jean-de-Dieu, rue Oudinot, n°19. Il croyait, à
ce moment, ne devoir y rester que quelques jours, et il avait écrit à son
frère, qui était alors en Belgique, et à ses neveux, de ne pas s'inquiéter
et de ne pas se déranger.
Malheureusement, la guérison se fit
attendre plus longtemps qu'il ne le pensait. L'enflure qui s'était
déclarée à la jambe ne diminuait pas et le réduisait à l'inaction et à
l'immobilité, ce qui, pour un homme habitué comme lui à une vie active et
laborieuse, constituait un véritable supplice.
Aussi, malgré les nombreuses visites qu'il
recevait de sa famille et de ses amis, supportait-il très impatiemment le
séjour à la maison de santé.
C'est à ce moment, le 27 juillet, qu'il m'a
été donné de le voir pour la dernière fois. Sur ses instances, je restai
longtemps près de lui, nous entretenant de ses ennuis, de ses projets et
de ses travaux en cours d'exécution.
Rien à ce moment, absolument rien, ne
pouvait nous alarmer sérieusement. Notre ami ne souffrait nullement. Pas
un mot ne sortit de sa bouche qui pût indiquer de sa part la préoccupation
d'une fin prochaine. Il se désolait seulement de son inaction forcée et
s'impatientait du retard de sa guérison qui l'obligeait à renoncer à ses
projets de voyage à Caen, à Zurich, etc.
Quelques jours après même, une légère
amélioration se produisit et notre ami put commencer à marcher un peu au
bras de son médecin.
Le 9 août, il avait fait, au bras de son
frère, quelques centaines de pas dans le couloir qui donnait accès à sa
chambre. Il attendait, à ce moment, avec une vive impatience, un appareil
que le médecin faisait fabriquer pour lui et qui en assurant sa marche,
devait lui permettre d'effectuer à bref délai son retour à Auxerre.
Mai le lendemain, 10 août, pendant qu'il
faisait dans la matinée sa promenade habituelle il fut pris d'un grand
malaise.
On dut lui faire prendre de l'éther et le
transporter sur sa chaise longue.
Dans la journée, cependant, il put recevoir
quelques visites, notamment celle de notre confrère M. Pellat, avec lequel
il s'entretint encore assez longtemps. Il écrivit à son frère une carte
postale pour lui raconter son indisposition de la matinée, attribuée au
laudanum qu'il avait pris pendant la nuit, et il lui disait de ne pas
s'inquiéter parce qu'il n'y avait rien de grave.
Il rédigea en même temps un télégramme de
remercîment à l'adresse de la section de géologie du Congrès de Caen qui
venait de lui exprimer son regret de ne pas le voir à la réunion.
Cette carte et ce télégramme, écrits
soigneusement et d'une main ferme, ont été remis par Cotteau, vers cinq
heures, à son neveu, M. le colonel du génie Georges Vial, qui devait de si
près le suivre dans la tombe.
Le médecin qui soignait Cotteau l'avait vu
deux fois dans la journée. Son malade, a-t-il dit, s'était mis dans une
grande colère en apprenant que son appareil n'était pas encore prêt. - Je
vois bien, - s'était-il écrié, - que je ne sortirai pas d'ici ; - mais, en
réalité, il n'en pensait nullement ainsi et, à aucun moment, il n'a eu
conscience de la gravité de sa situation.
Cependant le médecin venait à peine de
quitter la maison que l'on courait le rappeler, pour lui annoncer que le
malade venait de succomber subitement. il avait été foudroyé par une
congestion cérébrale, sur sa chaise longue, vers 6 heures, alors qu'il
venait de commencer son repas.
II
Tels furent, messieurs, les derniers
moments du savant éminent dont vous m'avez chargé de retracer la vie. La
nouvelle si imprévue de sa mort a causé parmi ses nombreux amis une
véritable stupeur. De tous les côtés, les lettres les plus touchantes et
empreintes d'une réelle douleur affluèrent et vinrent montrer à sa famille
combien vive était l'émotion générale et combien la perte de cet homme de
coeur était partout douloureusement ressentie.
Ses obsèques furent célébrées à Auxerre, au
milieu de l'affluence de la population tout entière. Plusieurs discours
remarquables furent prononcés sur sa tombe, notamment par MM. Ernest Petit
et Rabé, les vice-présidents de la Société des sciences de l'Yonne, qui
surent, en termes éloquents et émus, nous montrer l'immensité de la perte
que nous venions de faire.
Cotteau, en effet, était non seulement
estimé et justement considéré comme homme de science, mais il était en
outre cordialement aimé par tous ceux qui ont eu le bonheur de le
connaître. Un des traits les plus saillants de son caractère était un
fonds de bonté inépuisable, une affabilité pleine de courtoisie, une
bienveillance et une obligeance à toute épreuve.
Très indulgent pour tout le monde et très
accueillant pour les jeunes, il savait d'un mot heureux encourager et
récompenser leurs efforts.
Jamais, dans les comptes rendus si nombreux
qu'il a publiés sur les congrès et sur les réunions scientifiques, il n'a
eu pour les auteurs un seul mot de critique désobligeante. Ses analyses,
véritables modèles de clarté, d'exposition concise et de mesure, savaient
toujours faire ressortir avec bienveillance la valeur des communications.
Ses discussions, toujours courtoises, éclairaient les questions et,
parfois, rétablissaient les faits sans que le moindre froissement pût en
résulter pour les auteurs. Aussi partout était-il accueilli avec joie et,
quand il paraissait dans une réunion, tous les visages exprimaient le
contentement et toutes les mains se tendaient vers lui avec empressement.
Son caractère loyal et conciliant, son
sentiment profond de la dignité de la science lui avaient gagné l'estime
universelle. C'est en raison de cette estime que bien souvent il fut
choisi comme arbitre et comme intermédiaire, pour apaiser ces petites
querelles ou ces dissentiments, qui surgissent parfois entre savants.
III
Gustave Cotteau est né le 17 décembre 1818.
Il était donc dans sa soixante-seizième année quand la mort est venue le
frapper. Beaucoup de personnes, en apprenant cet âge par les lettres de
faire-part, ont manifesté un profond étonnement. Il était difficile, en
effet, de lui attribuer un pareil âge quand on le voyait aussi actif et
alerte, affrontant constamment de longs et fatigants voyages rempli
toujours d'une ardeur infatigable pour le travail et d'une animation
entraînante et toute juvénile dans sa conversation et dans ses discours.
Notre confrère, en effet, a eu ce rare
privilège de conserver jusqu'à sa fin, non seulement sa vigueur physique
et sa santé, mais encore toutes ses brillantes facultés, sa facilité de
travail et d'élocution, son heureuse mémoire, sa vive intelligence et,
chose plus rare encore, jusqu'à son excellente vue, instrument de travail
si précieux pour lui, qui a pu résister à l'usage incessant de la loupe et
au surmenage immodéré que lui imposait la nature spéciale de ses
recherches.
Cet état de santé de Gustave Cotteau n'a
cependant pas toujours été aussi florissant. A plusieurs reprises, il fut
fortement ébranlé. Au printemps de 1881, notamment, notre confrère fut
atteint d'une grave pneumonie qui le mit aux portes du tombeau et qui ne
paraissant pas devoir lui laisser encore d'aussi longs jours.
C'est à cette époque que, devant cette
grave situation, il arrêta ses dispositions testamentaires que vous
connaissez et qui, depuis ce moment, n'ont jamais varié.
Gustave Cotteau est venu au monde à
Auxerre, dans une maison située vers le n°43 de la rue de Paris, où sa
famille avait loué un appartement. Cependant ses parents habitaient le
village de Châtel-Censoir et c'est dans ce joli pays, aux vallées
profondes, aux collines couvertes d'épaisses forêts, dans cette partie
pittoresque de la vallée de l'Yonne, que s'écoulèrent les années de son
enfance.
Il fit ses études classiques au collège
d'Auxerre et, destiné à entrer dans la magistrature, il vint ensuite à
Paris faire ses études de droit.
C'est pendant ce séjour à Paris que semble
s'être fixée la vocation de notre confrère comme géologue et comme
échinologiste. Un journal de l'Yonne, l'Indépendant Auxerrois (n°
du 30 août 1894), a publié, à ce sujet, sous le titre "le hasard d'une
vocation", une curieuse anecdote qui lui a été, dit-il, adressée par
M. L. V., le savant professeur du Muséum, ami de notre regretté confrère.
Le récit en est un peu trop long pour que nous puissions le reproduire
in-extenso, mais il nous intéresse trop pour que nous n'en donnions pas au
moins un résumé.
Pendant qu'il étudiait le droit à Paris,
Gustave Cotteau serait entré un jour par hasard à la salle des ventes. Son
attention y aurait été fixée par une petite boîte contenant des
cristallisations et des coquilles de formes singulières, et le désir lui
serait venu de l'acquérir pour en orner sa chambre d'étudiant, où cela lui
paraissait devoir être d'un effet artistique.
Il mit sur ce lot un prix fort modique,
mais il se trouva en face d'un concurrent et une lutte aux enchères
s'engagea dans laquelle il sortit vainqueur.
Son concurrent, homme d'un certain âge,
décoré, fut étonné de voir un si jeune homme lui disputer un semblable
lot. Il s'approcha de lui pendant qu'il examinait le contenu de sa boîte,
et engagea la conversation en lui demandant s'il s'occupait d'histoire
naturelle. Cotteau lui répondit qu'il ne s'en occupait nullement et il
expliqua le but de son acquisition.
S'il en est ainsi, reprit l'étranger,
consentez à me céder deux ou trois de vos échantillons qui m'intéressent
et, en échange, je vous en donnerai d'autres non moins décoratifs.
Cotteau s'empressa de lui abandonner ces
échantillons et l'étranger, en lui remettant sa carte, l'engagea à venir
le voir, lui promettant de lui montrer sa collection et de lui déterminer
ses fossiles.
Ce concurrent n'était autre que M.
Michelin, conseiller à la Cour des comptes, grand amateur, comme on le
sait, d'Echinides et de Polypiers.
Cotteau n'eut garde de manquer à son
rendez-vous, et Michelin, très accueillant, lui donna des conseils et
l'initia à la connaissance des Oursins.
Quoique je ne sois pas en mesure, par des
renseignements personnels, de garantir l'authenticité de cet épisode de la
vie scientifique de Cotteau et que je n'en aie trouvé nulle trace dans sa
correspondance avec Michelin, je ne puis, en raison de la provenance qu'on
lui attribue, douter de sa véridicité.
Cependant j'ai la conviction que la part
faite au hasard dans ce récit est trop grande et trop exclusive. Il est
évident pour moi que, dès cette époque, Cotteau était un curieux des
choses de la nature et qu'il devait déjà avoir quelque connaissance des
fossiles. Le pays qu'il avant habité, le milieu où il avait vécu n'avaient
pas été sans exercer sur lui une certaine influence sous ce rapport. Dès
son enfance, il recueillait dans les environs de Châtel-Censoir des
Insectes, des Mollusques vivants et sans doute aussi des fossiles et des
Oursins qui, dans cette localité, étaient si abondants et si beaux qu'un
observateur comme lui ne pouvait pas n'en être pas frappé.
Ces habitudes de recherches semblent,
d'ailleurs, avoir été, de longue date, dans les traditions du collège
d'Auxerre. Pour en avoir la conviction je n'ai qu'à me reporter à ma
propre enfance. Nous étions nombreux parmi les élèves de ce collège qui
ramassions des fossiles ou des coquilles. Les carrières si riches et si
nombreuses qui existaient alors autour de la ville, étaient souvent le but
de nos promenades. Plusieurs de nos professeurs collectionnaient les
fossiles, encourageaient nos recherches et nous en prenaient même parfois
le produit. Il n'en fallait pas davantage pour déterminer ou développer le
goût de ce genre d'études chez les jeunes gens que leur esprit
d'observation et leur curiosité naturelle y prédisposaient. Je ne crois
donc pas que le hasard et le désir de décorer artistiquement sa chambre
aient seuls amené Gustave Cotteau à faire l'acquisition d'un lot de
fossiles à la salle des ventes. Dès ce moment, il avait, j'en suis
convaincu, ces goûts scientifiques, ce besoin de se procurer des matériaux
d'étude, ce feu sacré qu'il a montré toute sa vie.
Peut-être même, à l'époque où s'est
produite sa rencontre avec Michelin, Cotteau faisait-il déjà partie de la
Société géologique de France ; c'est en effet dès l'âge de 21 ans, alors
qu'il était étudiant, qu'il fut nommé membre de la Société et ce ne fut
pas, comme on devrait le croire d'après l'incident que nous venons de
conter, Michelin qui l'y présenta, mais d'autre parrains.
IV
Cotteau soutint le 25 août 1840 sa thèse
pour le grade de licencié en droit. Il revint ensuite s'installer dans
l'Yonne, partageant son temps entre Châtel-Censoir et Auxerre, jusqu'à
l'époque de sa nomination comme juge suppléant dans cette dernière ville,
le 6 mars 1846.
Cette période de son existence a été
laborieusement remplie par des recherches et des études variées pour le
développement de ses connaissances en histoire naturelle.
Il fit de nombreuses excursions et de longs
voyages d'instruction, notamment en Corse, où, en compagnie de M. Crosse,
ils explorèrent les côtes, faisant pêcher partout des coquilles et des
Oursins vivants ; puis sur les rivages du Cotentin où, avec son oncle, M.
Duru, qui, lui aussi, s'occupait de conchyliologie, il fit d'amples
récoltes de coquilles.
A cette époque sa vocation comme
échinologiste était définitivement fixée. La correspondance active qu'il
échangeait déjà avec les maîtres de la science le prouve surabondamment.
Davidson, dans une lettre datée de 1844, lui disait : "Puisque vous aimez
tant les Oursins, je vous réserve un Cidaris orné de ses
piquants....". Michelin, à la même date, lui écrivait : "je pense toujours
à vous pour les Oursins....". Il en était de même d'Hébert, de l'Orbigny,
de M. Crosse, etc.
C'est pendant cette même période aussi que
Cotteau fit paraître ses premières publications géologiques, soit dans l'Annuaire
de l'Yonne, soit dans le Bulletin de la Société géologique de
France, et quand, en 1847, fut fondée la Société des Sciences de
l'Yonne, il inaugura son premier bulletin en y publiant plusieurs notes
scientifiques, notamment un Aperçu sur la géologie du département de
l'Yonne, qui prouve combien déjà étaient étendues ses connaissances
sur cette région.
C'est en 1847 également, et dans ce même
recueil, qu'il publia son premier mémoire sur les Echinides, travail de
début, intéressant, dont nous parlerons plus loin avec quelques détails.
Cette même année 1847 fut, à un tout autre
point de vue, une date mémorable dans l'existence de Gustave Cotteau.
C'est, en effet, après son installation à Auxerre, que, le 8 juin 1847, il
se maria avec sa cousin, Mlle Amélie Duru, cette dévouée compagne qui
devait malheureusement lui être très tôt ravie.
Ce mariage qui, pendant dix-huit années,
assura à notre ami un bonheur domestique complet, eut en outre sur le
développement de ses goûts artistiques et sur sa vocation de
collectionneur une influence considérable.
M. Duru, son oncle et beau-père, était, en
effet, lui même un collectionneur émérite. Amateur éclairé des arts
céramiques, d'antiquités diverses, de tableaux, de manuscrits et de livret
rares, il s'était mis, en outre, à l'instigation, probablement, de son
neveu, à s'occuper de conchyliologie. Il parvint, par des achats
importants, par des voyages et par des échanges, à réunir une collection
remarquable de coquilles de l'époque actuelle.
Lors du décès de M. Duru qui, en 1868,
vint, par une singulière coïncidence finir ses jours, comme Cotteau, à la
maison de santé des Frères Sant-Jean-de-Dieu de la rue Oudinot, toutes ces
faïences, ces antiguités, ces coquillages revinrent à son gendre. Ce fut
là le noyau de ces magnifiques collections que tous les amateurs ont
connues et admirées, et que pendant toute sa vie notre confrère n'a cessé
d'enrichir et d'améliorer.
V
Le premier séjour de Gustave Cotteau à
Auxerre ne se prolongea pas longtemps. Par décret du 23 septembre 1851, il
fut nommé substitue à Bar-sur-Aube. Il ne resta que deux années dans cette
nouvelle résidence, mais ce court espace de temps fut néammoins bien
utilisé par lui pour la science. Il fit, dans les environs de
Bar-sur-Aube, d'actives recherches et, en 1854, il put publier une notice
sur les Echnides de l'étage kimmeridgien du département de l'Aube. Il
avait été, dès son arrivée, nommé membre de la Société d'Agriculture,
Sciences et Arts de ce département et, un peu plus tard, lors du congrès
scientifique tenu à Troyes, en 1865, il publia un catalogue raisonné des
Echinides de l'Aube.
Dès ce moment, toutefois, c'est à l'étude
de la géologie du département de l'Yonne que Cotteau consacrait la plus
grande partie de ses loisirs. Il avait commencé, en 1849, sa description
des Echinides fossiles de l'Yonne et, malgré son éloignement momentané, il
poursuivit sans relâche cet important travail qui l'occupa jusqu'en 1876.
En même temps il faisait paraître ses Etudes sur les Mollusques fossiles
du département de l'Yonne, travail également considérable, dont il ne
publia d'ailleurs que l'introduction et un prodrome, précieux encore à
tous ceux qui s'occupent de paléontologie.
Au mois de novembre 1853, Cotteau fut nommé
juge au tribunal civil de Coulommiers. Cette nomination, qui l'éloignait
de sa famille et qui l'envoyait dans un pays peu favorable à ses études,
fut accueillie par lui avec un certain regret. Il ne l'accepta que dans
l'espoir de voir son siège promptement transféré au tribunal d'Auxerre et,
en effet, il laissa ses collections dans cette dernière ville et ne
s'installa en quelque sorte que provisoirement à Coulommiers.
Cependant il demeura dans ce poste plus
longtemps qu'il ne le croyait. C'est neuf ans plus tard, seulement, qu'il
put enfin revenir à son pays natal et à la résidence de son choix.
Ce long séjour de notre confrère à
Coulommiers, où il ne fit guère de nouvelles études locales, lui permit
d'utiliser plus largement ses recherches antérieures et de mener
promptement à bien des travaux descriptifs considérables. Ses publications
pendant cette période furent en effet aussi nombreuses qu'importantes.
Indépendamment de la continuation de ses études sur les fossiles de
l'Yonne, il publia ses Echinides du département de la Sarthe, de
nombreuses notes sur la géologie et sur les Oursins, les premiers
fascicules de ses Echinides nouveaux ou peu connus, des rapports sur les
progrès de la géologie en France, etc. ; c'est en outre pendant cette même
période que, comme nous le dirons plus loin, il entreprit la continuation
de la Paléontologie française d'Alcide d'Orbigny, travail gigantesque qui
devait l'occuper jusqu'à sa dernière heure.
VI
Par décret du 11 août 1862, Cotteau fut
enfin nommé juge au tribunal civil d'Auxerre. Cette nomination, si
longtemps attendue, le combla de joie, ainsi que sa famille, et il
s'empressa de venir s'installer dans son cher pays natal, que dès lors il
ne devait plus quitter.
C'est dans l'année qui suivit cette
installation que j'eus le bonheur d'entrer en relations avec lui. Je lui
avais été présenté depuis quelques années déjà, mais c'est seulement en
1863 que nos relations s'établirent sur un certain pied d'intimité. Je
revenais alors de Corse où, comme je l'ai dit, Cotteau avait lui-même fait
un voyage, et je rapportais d'un assez long séjour sur différents points
du littoral une abondante collection d'animaux marins et surtout de ces
beaux Oursins fossiles qu'on trouve sur les falaises du Liceto et de
Santa-Manza, près de Bonifacio. C'est par l'examen en commun de tous ces
matériaux, utilisés plus tard par lui et par M. Locard, que commencèrent
sérieusement nos relations.
Cotteau venait alors de s'installer dans sa
belle et confortable maison de la rue du Réservoir. La plupart d'entre
vous, Messieurs, connaissent cette hospitalière demeure. C'est là, dans
cette propriété pourvue de jardins admirables et de locaux spacieux,
aménagés spécialement pour recevoir les diverses collections, que s'écoula
la vie de notre confrère. C'est là que, depuis cette époque,
s'accumulèrent toutes ces richesses scientifiques et artistiques qu'il
sut, en savant, en artiste et en homme de goût, disposer si admirablement.
Tous les amis de Cotteau et tous les hommes
de science en général ont toujours reçu là un accueil empressé et cordial.
Que de bonnes et agréables journées on y
venait passer. Que de fois des savants s'y sont trouvés réunis en nombre,
constituant de véritables petits congrès. Quelles bonnes causeries alors !
Quelles discussions animées sur les questions du jour, sur les travaux
récemment publiés, sur les petits événements du monde scientifique !
Notre confrère était un causeur qui savait
intéresser et charmer. Ses connaissances en toutes choses, ses voyages,
ses relations étendues dans le monde savant et la correspondance, qu'il
entretenait avec les notabilités scientifiques de toutes les nations,
alimentaient sa conversation et la rendaient aussi attrayante
qu'instructive.
De grands jours de plaisir aussi étaient
ceux où l'on allait avec lui fouiller les ravins et les carrières. Les
visiteurs si nombreux qu'il a ainsi guidés dans nos environs ne me
contrediront certes pas quand je dirai combien dans ces circonstances les
excursions avec lui étaient agréables et intéressantes. Les moindres
détails de nos assises, les moindres recoins de nos carrières lui étaient
familiers, mais à ces détails locaux ne se bornaient pas les
renseignements qu'il savait donner. Sa connaissance de nombreuses autres
régions lui permettait de comparer et de généraliser les faits, et c'était
alors de véritables leçons pratiques qu'il donnait sur le terrain à ses
compagnons d'excursion.
Parfois nous avions la bonne fortune de
rencontrer chez lui son frère, M. Edmond Cotteau, de retour de l'un de ses
grands voyages, et alors ses récits si intéressants et si variés étaient
une distraction charmante à nos causeries géologiques.
En son absence, d'ailleurs, Cotteau aimait
beaucoup à nous lire les lettres de son frère, véritables journaux de
voyage, datés de toutes les parties du monde et remplis de faits toujours
nouveaux, de détails curieux et d'incidents émouvants. Il se passionnait à
la lecture de ces lettres et savait par son animation et l'intérêt qu'il y
prenait lui-même les rendre plus attrayantes encore.
D'autres fois, il avait à nous lire des
lettres moins sérieuses et à nous conter les petits faits anecdotiques de
sa correspondance.
C'était tantôt un collectionneur qui lui
envoyait, sous le nom de membres d'enfant pétrifiés, des silex de la craie
aux formes bizarres et qui lui demandait de confirmer cette détermination.
Tantôt c'était un autre correspondant qui,
ayant appris que notre confrère, indépendamment des fossiles, avait une
collection d'Oursins vivants, lui demandait gravement comment il faisait
pour les nourrir.
Un autre enfin, en lui envoyant des Oursins
et voulant, suivant les recommandations, préciser les conditions du
gisement, expliquait avec détails que tous ces Oursins avaient été trouvés
sur le versant sud de la colline, lequel étant plus chaud et mieux
ensoleillé que le versant nord, convenait mieux, sans doute à leur
développement.
Cotteau répondait à toutes ces questions
avec une parfaite et méritoire obligeance.
Il avait pour principe qu'il faut toujours
encourages les chercheurs, et qu'en les dirigeant convenablement et
patiemment, on pouvait toujours en attendre de sérieux services.
VII
Je viens de parler, Messieurs, de la
correspondance scientifique considérable de notre confrère. Dès l'origine
il n'a soigneusement conservée.
Avec une curiosité bien excusable, je me
suis permis d'en parcourir une partie, surtout les lettres anciennes,
émanant des anciens et vénérés maîtres qui ne sont plus parmi nous.
Combien est attachante la lecture de ces lettres où se déroule tout
entière l'histoire de la géologie, de l'échinologie et de l'archéologie
pendant plus d'un demi-siècle ! On y trouve l'écho de toutes les grandes
discussions qui ont agité le monde scientifique et parfois aussi de toutes
les petites querelles qui l'ont divisé.
Plus de 300 noms, parmi lesquels ceux de
toutes les notabilités scientifiques, sont signés au bas de ces lettres,
témoignant de l'étendue des relations de Cotteau dans le monde entier.
Qu'on me permette de citer particulièrement les lettres très affectueuses
de d'Orbigny, dont la plus ancienne qui soit entre mes mains remonte à
1841, puis celles de Michelin, d'Agassiz, de des Moulins, de Desor, de
Lovén, etc., où l'on voit se développer l'échinologie et que complètent
les lettres plus récentes de nos confrères qui aujourd'hui continuent
l'œuvre de ces anciens maîtres, notamment celles de M. de Loriol, l'un des
meilleurs et des plus intimes amis de Cotteau, de M. Gauthier, devenu
depuis longtemps son collaborateur, et de M. Lambert, son compatriote et
un peu son disciple.
C'est encore la correspondance volumineuse
de Triger, parfois vive et malicieuse, mais toujours remplie de détails et
de discussions stratigraphiques particulièrement intéressants ; celle
également considérable de Davidson, empreinte d'un zèle ardent pour la
science et où l'on trouve des renseignements curieux sur notre propre pays
; celle d'Hébert, dont la triple qualité de grand savant, de compatriote
et d'ancien condisciple de Cotteau, explique suffisamment l'intérêt qu'on
y trouve et la grande intimité qui y règne ; puis les lettres du comte de
Saporta, cet éminent confrère dont nous déplorons la perte récente, et où
je ne veux relever que ses vives instances pour amener Cotteau à l'étude
des végétaux fossiles et l'espoir qu'il a eu un moment d'y parvenir.
Je veux citer encore parmi les plus
précieuses, les lettres nombreuses de de Caumont, le dévoué directeur de
l'Institut des provinces, où l'on assiste à l'organisation de tous les
Congrès scientifiques tenus dans les diverses villes de France et où l'on
voit quel r^le important Cotteau y remplissait ; puis celles de M. Crosse,
toujours spirituelles et enjouées et pleines d'anecdotes amusantes ;
celles enfin de Bayle, parfois mordantes, mais toujours d'une plaisante
originalité, dans lesquelles l'éminent professeur traitait les questions
scientifiques d'une façon tout humoristique, démontrant par exemple à
Cotteau qu'il ne fallait pas prononcer Ekinides, ou Rhynkonelles, mais
bien Echinides et Rhynchonelles car nous disons cornichon et
non cornikon.
Le talent de dessinateur de Bayle se
donnait libre carrière dans ces lettres. Suivant le sujet traité, son
paraphe figurait un Mammouth, un Gastropode, un Diceras ou un Oursin, et
le nom du signataire était perché, en caractères microscopiques, au bout
de la queue de l'Eléphant, à l'extrémité de la spire du Gastropode ou à
celle d'un radiole d'Oursin, qu'il appelait plaisamment Microcidaris
Baylisans.
Une des choses qui frappent le plus à la
lecture de ces lettres, c'est la confiance et l'affection que tous ses
correspondants témoignent à notre confrère. Commencées, comme il arrive
habituellement, par des demandes de communications, d'échanges ou de
déterminations, les relations avec lui se consolident rapidement et
s'établissent sur un pied de franche amitié réciproque. Rien n'est plus à
l'éloge de Cotteau que ces témoignages universels d'estime et de sympathie
que, de toutes parts, lui attiraient son caractère franc et loyal et la
sûreté de ses relations.
VIII
Les années qui suivirent l'installation de
Gustave Cotteau à Auxerre ne comptèrent pas que des jours heureux. A
plusieurs reprises il fut cruellement éprouvé.
Vers la fin de 1865, il fut frappé dans ses
plus chères affections. Sa compagne aimée, cette femme dévouée et éclaire
qui contribuait si puissamment à faire le charme de sa maison, lui fut
subitement enlevée, ainsi que l'enfant auquel elle venait de donner le
jour, après dix-huit années d'un mariage stérile.
En 1868, il perdit son beau-père, M. Duru,
le zélé collectionneur dont nous avons déjà parlé, qui s'était si
fructueusement associé à ses recherches : puis, dans cette même année, un
nouveau deuil vint encore jeter l'affliction dans sa vie. Sa sœur
bien-aimée, Madame de Vaux, lui fut à son tour ravie, à la suite d'une
longue et douloureuse maladie.
Ces terribles épreuves abattirent pour
longtemps le courage de notre ami. Cependant, malgré ces pertes cruelles,
il resta encore partagé heureusement sous le rapport de la famille. Il put
conserver son père jusqu'en 1874 et il trouva dans l'affection de son
beau-frère, M. de Vaux et de ses enfants et dans celle de son frère une
puissante consolation.
Gustave Cotteau avait pour son frère Edmond
une affection profonde. Plus âgé que lui d'une quinzaine d'années, il
l'avait vu grandir et l'avait, dès l'enfance, associé à ses recherches
dans les environs de Châtel-Censoir. Plus tard, quand Edmond Cotteau fut
devenu l'intrépide voyage, dont la notoriété est universelle, et quand ses
récits de voyage, si instructifs et si attachants, eurent obtenu auprès du
grand public le succès que l'on connaît et auprès de l'Académie française
une de ses récompenses les plus enviées, notre confrère en était plus fier
que de ses propres succès, et l'un de ses plus grands plaisirs était d'en
entretenir ses amis.
Grâce à ces affections qui l'entouraient
encore, Gustave Cotteau put réagir contre son chagrin. Se plongeant avec
plus d'ardeur que jamais dans l'étude, il sut y trouver ces puissantes
distractions qu'elle réserve aux travailleurs.
Résolu dès lors à consacrer uniquement à la
science sa vie tout entière, il prit le parti de se démettre de ses
fonctions. Le 22 juillet 1872 sa démission de juge au tribunal d'Auxerre
était acceptée, et il était nommé juge honoraire.
Affranchi désormais de toute obligation
étrangère à la science, bien favorisé sous le rapport de la fortune, il
put entièrement se vouer à ses études. Nous le voyons, à dater de ce
moment, l'hôte assidu de tous les congrès et de toutes les grandes
réunions scientifiques, à l'étranger comme en France ; nous le voyons,
pour être plus au centre du mouvement scientique, prendre un domicile à
Paris et partager dès lors son temps entre sa résidence d'Auxerre, où il
préparait et rédigeait ses travaux, et celle de Paris, où il en
surveillait l'exécution matérielle.
IX
L'œuvre de Gustave Cotteau est énorme.
Produit d'un labeur incessant pendant cinquante années d'une vie toute
remplie par la science, elle a acquis une importance véritablement
exceptionnelle. Le catalogue que j'en ai dressé et qui est annexé à la
présente notice ne comprend pas moins de 168 numéros et encore souvent des
notes distinctes, mais afférentes au même sujet, ont-elles été réunies
sous le même numéro.
On comprend facilement qu'il n'est pas
possible d'entreprendre, dans le cadre restreint d'une simple notice,
l'analyse détaillée d'une pareille oeuvre. Cotteau lui-même d'ailleurs
nous en a donné, pour ses oeuvres antérieures à 1885, un résumé très
substantiel, rédigé naturellement avec une connaissance de cause qu'on ne
peut demander meilleure, et en même temps avec une simplicité et une
modestie que nous devons admirer.
Je vous demanderai donc seulement la
permission de rappeler ici les grandes lignes de cette œuvre et de faire
connaître quelques détails peu connus, se rattachant le plus souvent à
l'historique de ces travaux.
Les premières œuvres de G. Cotteau furent
purement littéraires. Dès 1836 il publia dans les journaux et dans
l'Annuaire de l'Yonne des pièces de poésie qui furent remarquées. Mais ces
œuvres sortent de notre domaine et nous ne pouvons nous y arrêter.
C'est en 1844, il y a plus de 50 ans, que
parurent ses premiers travaux scientifiques. C'étaient des notes
géologiques sur les environs de Châtel-Censoir et sur le département de
l'Yonne, notamment sur les couches oxfordiennes et sur le terrain aptien,
puis, peu après, des études sur le massif corallien, sur les blocs
erratiques, etc.
En 1847, nous voyons apparaître son premier
ouvrage sur les Echinides. Il fut inséré dans le Bulletin de la Société
des Sciences de l'Yonne sous le titre de "Note sur le Dysaster
Michelini".
Ce petit travail de notre confrère mérite
qu'on s'y arrête quelques instants, non pas seulement parce qu'il fut son
début dans l'étude des Echinides, mais parce qu'il fut l'origine d'une
discussion courtoise mais animée qui s'engagea entre lui et Michelin, et à
laquelle furent mêlés d'autres échinologistes, Desor et Agassiz.
Michelin, en effet, qui, quelques années
auparavant, avait, conformément à l'idée émise par Agassiz, adopté le
genre Metaporhinus précisément pour l'Oursin en question ne pouvait
admettre que notre confrère l'eut placé dans le genre Dysaster.
Dans une longue correspondance, il en
expliquait les motifs et combattait la manière de voir de Desor et de
d'Orbigny à laquelle Cotteau s'était rallié.
Michelin eut gain de cause d'ailleurs dans
cette discussion. Cotteau après avoir, dans le genre Metaporhinus,
revint sur son opinion à la suite de nouvelles trouvailles qui lui
permirent de mieux discerner les caractères distinctifs de ces Oursins et,
en 1860, dans une nouvelle note sur le genre Metaporhinus et la
famille des Collyritidées, il adopta et justifia complètement la manière
de voir de Michelin.
Le premier ouvrage important que publia
Cotteau fut ses Etudes sur les Echinides fossiles de l'Yonne.
Commencées en 1849 et publiées par fascicules dans le Bulletin de la
Société des Sciences de l'Yonne, ces études ne furent terminées qu'en
1876. Toutefois la publication du premier volume, qui fut achevée en 1856
et qui fit connaître tous ces beaux Oursins du Corallien de l'Yonne, où
notre confrère découvrit plus de 50 espèces, suffit pour établir, dès ce
moment, sa réputation comme échinologiste.
Dès 1853, Desor lui écrivait : "Ce n'est
certes pas une flatterie de vous dire que pour s'occuper d'une manière
sérieuse et avec fruit de l'étude des Oursins, il est indispensable de
vous connaître et de vous étudier. Voici bien des mois que votre ouvrage
est sur ma table, à côté de moi, en compagnie de ceux de MM. Forbes, Gras,
Quenstedt, etc., et il ne se passe pas de jours que je ne vous consulte."
Presque immédiatement après son premier
volume des Oursins de l'Yonne, G. Cotteau publia un autre ouvrage, non
moins important, les Echinides du département de la Sarthe, qu'il
avait entrepris sur les instances de Triger et avec sa collaboration pour
ce qui concerne la stratigraphie.
Ce fut la publication de ces beaux travaux
qui, à ce moment, le désigna à l'attention des savants pour la
continuation de la Paléontologie française d'Alcide d'Orbigny.
Lors de la mort de notre grand
paléontologue, en effet, le volume des Echinides crétacés irréguliers
était en cours de publication. Il restait à publier, sur ce volume, les
genres Catopygus, Pyrina et Echinocononus, sur
lesquels d'Orbigny avait laissé des notes manuscrites qu'il était
nécessaire de coordonner et de compléter.
Dès 1857, notre éminent confrère, M. le
professeur Albert Gaudry, beau-frès de d'Orbigny, fit des ouvertures à
Cotteau pour la continuation de son oeuvre. Cette première démarche
toutefois ne fut pas suivie d'effet immédiat. Des négociations s'étant
ouvertes pour l'acquisition de la Paléontologie française par l'un
de nos grands éditeurs, M. Gaudry dut retirer sa proposition.
Gustave Cotteau cependant était désireux
d'entreprendre ce beau travail dont la haute importance et le renom, déjà
universel, plaisaient à son ardeur ; mais, à la suite de l'acquisition de
l'ouvrage par M. Masson, il eut une instant d'incertitude sur la question
de la continuation. Il avait entendu dire que des propositions avaient été
faites à Desor à ce sujet et, ne voulant pas se mettre en concurrence avec
lui, il lui demanda franchement et loyalement ce qu'il en était, lui
assurant qu'il applaudirait de grand cœur si le fait était exact.
Dans une lettre aussi élogieuse
qu'affectueuse, Desor déclara qu'aucune proposition ne lui avait été
faite, que Cotteau, qui connaissait les Oursins mieux que personne, était
naturellement désigné pour ce travail et que, dans l'intérêt même de
l'ouvrage, il était à souhaiter qu'on s'en tint au premier projet.
A la suite de ces pourparlers, en 1859, M.
Masson chargea Cotteau de l'achèvement du volume des Echinides
irréguliers. Puis, sur ces entrefaites, au mois de juin 1860, sur
l'initiative des plus hautes autorités scientifiques, fut constitué le
comité de spécialistes, tous membres de la Société géologique, qui fut
chargé de continuer l'oeuvre de d'Orbigny.
Cotteau, appelé à en faire partie, en
devint bientôt le membre le plus actif et le plus zélé. Après la fin des
Echinides irréguliers crétacés il publia les réguliers de ce terrain en un
volume de 892 pages avec un atlas de 200 planches. Puis, de 1867 à 1885,
il publia tous les Echinides jurassiques, occupant 3 volumes de texte et
518 planches, et, de 1885 à 1894, les Echinides éocènes en 2 volumes et
384 planches.
Il ne restait plus pour achever cette
œuvre colossale qu'à faire connaître les Echinides du terrain tertiaire
moyen et supérieur. M. Masson, pour qui la Paléontologie française était
depuis longtemps devenue une assez lourde charge, ne voulait pas
entreprendre cette dernière publication. Cependant, par amitié pour
Cotteau et sur ses instances, il avait fini par y consentir. Déjà notre
confrère, avec une hâte que ne justifiait que trop son âge avancé, faisant
appel à tous les chercheurs, avait réuni des matériaux considérables.
Plus de 80 personnes ou musées lui avaient
de toutes parts envoyé leurs Oursins miocènes. Déjà la première livraison
était composée et tirée en épreuves, les planches étaient dessinées, quand
la mort tout d'un coup est venue en arrêter la publication.
Cette dernière œuvre de Cotteau n'est pas
absolument perdue pour la science. Sur mes instances, M. Masson a bien
voulu m'en faire tirer quelques rares exemplaires, mais cette livraison ne
sera pas publiée.
Il semble même qu'à moins de circonstances
bien spéciales il en est fini de la Paléontologie française.
Comme me le disait récemment M. Masson,
Cotteau a emporté avec lui dans la tombe non seulement le volume des
Echinides miocènes mais encore toute continuation de la grande œuvre de
d'Orbigny.
Telle qu'elle est cependant, la part de
Cotteau dans ce gigantesque travail n'en constitue pas moins l'une des
monographies les plus importantes qui aient jamais été publiées. Elle a
fait le plus grand honneur à la science française et, grâce à notre ami,
la classe des Echinides, l'une des plus ignorées jusque-là, est
actuellement l'une de celles qui rendent le plus de services à la
géologie.
Quelque considérable que fût le labeur
qu'exigeait la préparation d'une pareille œuvre, il s'en faut de beaucoup
cependant que Cotteau bornât ses efforts à cette publication. Les quelques
livraisons qu'il pouvait annuellement faire paraître étaient loin de
suffire à son activité, aussi publia-t-il simultanément de nombreux autres
travaux.
En ce qui concerne les Echinides, on peut
dire qu'il étudia ceux de toutes les parties du monde.
Pour ceux de la France, indépendamment des
fascicules annuels qu'il publiait sur des Oursins nouveaux ou peu connus
de toutes provenances et après ses descriptions des Echinides de l'Yonne
et de ceux de la Sarthe, il publia des monographies spéciales sur ceux de
l'Aube, des Pyrénées, de la Haute-Marne, de la Haute-Saône, des
Bouches-du-Rhône, de l'Ardèche, de Biarritz, du Garumnien, de la Lorraine,
des Corbières, de la Corse, du Sud-Ouest de la France, de la Normandie,
des environs de Bordeaux, de Saint-Palais, de la Loire-Inférieure et de la
Vendée, de l'Algérie, etc.
A l'étranger, il étudia ceux de la
Palestine, de la Syrie, de la province du Hainaut, de la Suède, des
Antilles suédoises, du calcaire de Mons, des terrains tertiaires de
Belgique, de l'île de Cuba, des Karpates (Stramberg), du Mexique, de
Madagascar, du Liban, du Turkestan, et, en Espagne, ceux de la province d'Oviédo,
ceux de l'Aragon et ceux de la province d'Alicante. En mourant, il laisse
encore inédites des études sur les Oursins de la Perse et sur ceux de la
Sardaigne que, grâce à la collaboration de notre confrère M. Gauthier, nous
connaîtrons prochainement.
Comme l'a rappelé en termes éloquents, M.
Emile Blanchard devant l'Académie des Sciences, Cotteau a eu sous les yeux
tous les exemplaires d'Oursins recueillis dans les différentes parties du
monde. "Allez," a-t-il dit, "de Londres à San-Francisco ; allez de
Saint-Pétersbourg à Sydney ; dans chaque ville où il existe un musée
d'histoire naturelle, si vous demandez : avez-vous des Oursins ?, le
conservateur ne manquera jamais de vous répondre : certes nous avons des
Oursins et encore sont-ils déterminés par M. Cotteau."
Il est impossible, dans ce rapide aperçu,
d'indiquer tous les progrès que notre confrère a fait faire à
l'échinologie et notamment d'énumérer les espèces nouvelles ou même
seulement les genres nouveaux qu'il a fait connaître. Le nombre en est
considérable et tous les savants que la question intéresse pourront
toujours facilement les retrouver dans ses propres travaux. I convient
seulement d'insister ici sur le soin scrupuleux avec lequel ces genres et
ces espèces ont été étudiés, sur la méthode vraiment scientifique suivie
par lui dans ses descriptions et dans ses classifications, et enfin sur
l'idée philosophique qui l'inspirait dansla distinction et le groupement
des espèces.
Cotteau, comme la plupart de ses anciens
maîtres et amis, croyait fermement à l'indépendance et à la fixité des
espèces. L'étude minutieuse qu'il a faite des Echinides fossiles l'avait,
disait-il, de plus en plus confirmé dans cette croyance. Bien que placés
sur les degrés inférieurs de l'échelle des êtres, les Echinides
fournissent, selon lui, dans cette grave question, des arguments d'une
incontestable valeur. Jamais, notamment, on n'y retrouve de traces des
modifications successives des types préexistants se transformant suivant
les milieux où ils se développent ; jamais on n'y retrouve aucun de ces
types intermédiaires qui auraient dû servir de passage entre une espèce et
une autre. La plupart des genres apparaissent sans qu'il soit possible de
trouver à l'époque précédente une forme voisine dont ils puissent être les
descendants ; de même, quand ils disparaissent de la série animale, c'est
pour s'éteindre complètement. Les types qui les remplacent ne sauraient,
en aucune manière, leur être rattachés.
Pénétrés de ces idées et désireux d'en
fournir la justification, il cherchait attentivement, pour l'établissement
de ses espèces, le caractère spécial susceptible de donner à chacune
d'elles son individualité propre et de justifier son autonomie.
Evidemment, il ne pouvait toujours y
réussir au même degré. Parfois l'amplitude des variations que présentent
beaucoup d'espèces l'embarrassait et lui rendait difficile la séparation
spécifique de certaines formes ayant entre elles de grandes affinités. Il
n'hésitait pas alors à avouer sincèrement ses doutes.
Il est incontestable que, malgré ses
affirmations, les partisans de la mutabilité des espèces peuvent trouver
dans son œuvre, comme d'ailleurs dans toutes les œuvres similaires, de
nombreux arguments à l'appui de leur manière de voir. C'est là, du reste,
au moins pour une part, la conséquence de l'incertitude où, malgré les
nombreuses définitions qui en ont été données, nous sommes encore au sujet
de l'entité de ces groupes d'individus qu'en histoire naturelle on
désigne, assez arbitrairement, par les mots genre, espèce et
variété. La conception que nous avons de ces divers groupements
varie singulièrement suivant le genre d'études et les idées particulières
de chacun.
Tels caractères différentiels qui, pour
certains naturalistes, peuvent n'être que le résultat d'une simple
variation individuelle, peuvent acquérir aux yeux de certains autres, une
importance spécifique ou même générique. En réalité, nous n'avons à ce
sujet aucun criterium certain. Nous ne pouvons, à ces manières de voir si
divergentes, opposer jamais aucune objection péremptoire. En paléontologie
surtout, l'arbitraire règne en maître et nous n'avons pour garantie que la
science, la circonspection et la sincérité du descripteur.
Cotteau présentait au plus haut degré ces
garanties. Il était vraiment sans parti pris et d'ailleurs très tolérant
pour les idées des autres ; aussi tous les paléontologues, même ceux qui,
au point de vue philosophique, ne partageaient pas sa manière de voir,
accueillaient avec confiance ses conclusions.
C'est toujours avec une attention
consciencieuse et sans se laisser entraîner par aucune idée préconçue
qu'il suivant, dans la longue succession des âges géologiques, les
modifications incessantes de la faune échinitique, qu'il s'est attaché à
montrer l'association des formes propres à chaque époque et à indiquer les
types, assez rares, selon lui, et d'une longévité exceptionnelle, qui
persistaient dans les époques suivantes.
En ce qui concerne la classification
générale des Echinides et leur répartition en grands groupes, notre
confrère a toujours montré ce même esprit scientifique prudent et mesuré.
Se gardant soigneusement de rejeter toutes les idées précédemment acquises
et de bouleverses la nomenclature, il s'est contenté de l'améliorer
prudemment et progressivement.
C'est ainsi qu'ayant, dans le principe,
adopté pour l'ensemble des Echinides les seules quatre grandes familles
reconnues par Agassiz, il admit successivement des démembrements
importants, à ce point que, dans ses derniers travaux, au lieu des quatre
familles primitives, il en reconnaissait dix-sept.
En cela, évidemment, Cotteau a obéi à cette
tendance irrésistible qui porte en ce moment les naturalistes au
morcellement presque indéfini et pour ainsi dire à l'émiettement des
anciens groupes, aussi bien des familles que des genres et des espèces.
Dès le commencement de ses recherches sur
les Oursins fossiles, Cotteau s'était préparé à la parfaite connaissance
de leur organisation par une étude approfondie des espèces actuellement
vivantes.
C'est grâce à cette connaissance des
détails de leur organisme qu'il a pu nous faire connaître bien des faits
et bien des détails ignorés jusque-là dans les fossiles, comme la
véritable orientation des Salénidées, la constitution de l'apex dans de
nombreux genres comme les Goniopygus, les Glyphocyphus, les
Anorthopygus, etc. ; puis certains organes délicats comme les
appareils masticatoires, come les plaques anales et buccales, si rarement
conservées dans les Oursins fossiles ; puis enfin de nombreux cas
tératologiques, des anomalies curieuses de constitution, etc., etc.
L'ensemble de l'oeuvre de Gustave Cotteau
sur l'échinologie ne comprend pas moins de 5.000 pages et près de 1.600
planches. Toutes ces planches ont été exécutées par son fidèle et habile
dessinateur, M. Humbert, et, comme l'a dit Cotteau lui-même, elles l'ont
été avec un talent, avec une exactitude et une finesse de détails qui
n'ont été surpassés nulle part, et qui facilitent singulièrement la
parfaite connaissance et la détermination précise des espèces.
Sur ce dernier point, permettez-moi,
Messieurs, de m'arrêter encore un peu. Il importe, en effet, de démontrer
ici que l'oeuvre de Cotteau n'a pas réalisé que des progrès purement
zoologiques, mais qu'elle a rendu à la géologie générale les plus signalés
services. Tous les stratigraphes, en effet, m'approuveront, sans nul
doute, quand je dirai combien les Oursins nous sont actuellement précieux
pour la distinction et la détermination des horizons géologiques. Les
Céphalopodes à coquilles chambrées seuls peuvent lutter, sous ce rapport,
d'importance avec les Echinides. Peut-être même l'utilité de ces derniers
est-elle plus grande encore ?
Les céphalopodes cloisonnés, en effet, en
raison de leur mode d'existence et de leur mode de dispersion dans les
sédiments, sont réputés fossiles caractéristiques par excellence. Les
stratigraphes leur accordent toute leur confiance, de préférence aux
autres fossiles ; mais il faut considérer que nous ne pouvons plus les
utiliser en deçà des terrains secondaires.
Il semble d'ailleurs que les Ammonites et
les Echinides se complètent et se suppléent pour nous aider dans nos
recherches stratigraphiques.
On ne peut avancer qu'il y ait entre ces
deux catégories de fossiles une incompatibilité complète puisque, pour
plusieurs genres au moins, les Echinides se montrent dans certaines
assises, simultanément avec des Ammonites, mais il n'en est pas moins réel
que, presque généralement, ces deux faunes sont à peu près exclusives
l'une de l'autre. Sans aller au loin chercher des exemples qui abondent,
si nous regardons auprès de nous, dans nos terrains secondaires du Bassin
de Paris, nous voyons que toujours les assises très riches en Ammonites,
sont dépourvues d'Oursins et vice-versa. Nos étages du Lias, le Callovien,
l'Oxfordien, le Portlandien, l'Albien où foisonnent les Ammonites, sont
excessivement pauvres en Echinides. Au contraire, le Bathonien, le
Rauracien, l'Astartien, puis tout le Crétacé supérieur sont fort riches en
Echinodermes, à l'exclusion presque complète des Ammonites.
Comment en particulier serions-nous
parvenus à distinguer les horizons successifs du grand massif de notre
craie blanche sans l'aide des Micraster, des Echinocorys
et autres Echinides ?
Dans les terrains tertiaires, le rôle des
Echinides est encore plus important et devient même tout à fait
prépondérant. Aussi, devons-nous regretter sincèrement que l'oeuvre du
maître ait été arrêtée à la moitié de ces terrains et que nous soyions
ainsi privés de la série complète de la faune échinologique miocène et
pliocène.
Les oursins, comme l'a fait remarquer
Cotteau lui-même, se prêtent mieux que la plupart des autres fossiles à
une distinction spécifique rigoureuse. En raison de la complication et de
la multiplicité des détails à étudier sur leur squelette calcaire, leur
taxonomie acquiert un degré de précision que nous ne saurions atteindre
dans les autres fossiles. Alors que dans les Mollusques, par exemple, la
forme générale, l'ornementation de la coquille et les détails de la
columelle ou de la charnière, quand on a la bonne fortune, assez rare, de
les pouvoir étudier, sont à peu près les seuls éléments dont disposent le
plus souvent les paléontologues pour distinguer les genres et les espèces,
dans les Echinides, au contraire, en même temps qu'une forme extrêmement
variable et des différences infinies de structure et de microstructure, on
a encore à étudier de nombreux organes ou caractères externes tels que les
plaques ocellaires et les plaques oviducales, les ambulacres et leurs
pores, les impressions diverses, les fascioles, le péristome et le
périprocte, dont la position est si variable, l'appareil apical, les
tubercules servant de support aux radioles, les radioles eux-mêmes qui
parfois ont suffi, en raison de leurs différences, pour motiver la
distinction de certaines espèces dont cependant les tests paraissaient
identiques.
Cotteau s'est attaché avec un soin
minutieux à nous bien décrire tous ces organes dans les diagnoses de
chaque espèce et à nous les montrer aux yeux dans d'excellentes figures.
Aussi ses espèces sont-elles généralement bien définies et facilement
reconnaissables. En outre, toujours il a eu la précaution d'indiquer d'une
façon détaillée les divers horizons géologiques habités par chacune
d'elles, et toutes les localités de la France et de l'étranger où se
présence a été constatée.
Dans ces conditions on doit reconnaître
que, grâce à lui, les Echinides sont devenus l'un des plus puissants
auxiliaires de la stratigraphie, à ce point que, comme il l'a dit
lui-même, un débris d'Oursin suffit souvent pour fixer l'âge incertain
d'une assise.
IX
L'oeuvre de Cotteau, en dehors de ses
travaux sur les Echinides, pour être moins importante que ceux-ci, n'en
constitue pas moins un ensemble considérable suffisant pour asseoir, à lui
seul, la réputation d'un savant.
Elle consiste d'abord, en ce qui concerne
les travaux originaux, en notes nombreuses sur la géologie des
départements de l'Yonne et de l'Aube, sur des Mollusques fossiles, su
l'archéologie, etc. Plusieurs de ces notes furent consacrées à débrouiller
la stratigraphie si compliquée de notre étage corallien, et à établir ses
rapports avec les couches oxfordiennes par le bas et avec les couches
astartiennes par le haut. D'autres furent consacrées à l'étude de nos
terrains tertiaires et quaternaires, au mode de formation des grottes de
la vallée de la Cure, à l'origine de nos blocs erratiques, etc.
Dans ses études sur les Echinides de
l'Yonne, il fit précéder la description des espèces de chaque étage d'une
étude géologique des couches qui les renferment et, comme dans notre
département, très privilégié sous ce rapport, tous les étages des terrains
secondaires sont richement représentés, il en est résulté que Cotteau,
avec l'aide de quelques collaborateurs pour les étages supérieurs, a
décrit la série très complète des terrains secondaires.
Plus tard, pour accompagner le mémoire
paléontologique de M. de Loriol sur la faune de l'étage portlandien de
l'Yonne, il rédigea une notice très détaillée sur la stratigraphie, la
lithologie et l'extension géographique des couches de cet horizon.
Parmi les travaux d'ordre analytique, nous
devons citer, en première ligne, cette importante série de rapports
annuels sur les progrès de la géologie, qu'il publia régulièrement pendant
douze années pour satisfaire aux instances de l'Institut des provinces.
Ces rapports, qui résumaient d'une façon
claire et concise tous les travaux publiés en France pendant l'année
écoulée, obtinrent toujours un légitime succès. M. de Caumont les
considérait come la communication la plus importante de ses congrès
scientifiques.
La Revue de Géologie, que MM.
Delesse et de Lapparent ont longtemps publiée par fascicules annuels, a
poursuivi l'idée de Cotteau en l'étendant et en y comprenant le mouvement
scientifique à l'étranger.
Puis ce sont des rapports sur les musées et
les expositions d'histoire naturelle de la province. Le premier de ces
rapports avait été rédigé en vertu d'une mission spéciale confiée à notre
ami par l'Institut des Provinces. Il visita les musées de Tours, Poitiers,
Niort, La Rochelle, Angoulême, Bordeaux, Dax, Mont-de-Marsan, Bayonne,
Pau, Bagnères-de-Bigorre, Tarbes, Toulouse, Montauban et Auch, et pour
tout cela une indemnité quelque peu dérisoire de 200 francs lui avait été
allouée.
Plus tard, il étendit ces rapports aux
musées de la Suisse et de l'Allemagne su Sud.
Il faut enfin citer encore ici ses nombreux
comptes-rendus des congrès scientifiques et des réunions de sociétés
savantes, que Cotteau donnait principalement à notre Société des Sciences
de l'Yonne et grâce auxquels cette Société était si bien tenue au courant
du mouvement des sciences naturelles, puis des conférences sur divers
sujets qu'il a faites soit à Auxerre même, soit dans les congrès de
l'Association française, et, pour en finir avec cette longue énumération,
de nombreux traaux sur l'archéologie préhistorique, dont le principal, un
volume de plus de 300 pages, illustré de nombreuses figures, fut rédigé en
1889, sur la demande expresse de son éditeur, M. Baillière, pour la
Bibliothèque scientifique contemporaine, et eut un succès
considérable.
XII
Telle est à grands traits, et telle qu'il
est possible de la résumer ici, l'oeuvre de Gustave Cotteau. Mais, pour
lui rendre toute la justice qui lui est due, il nous faut lui tenir compte
encore des services fort nombreux qu'il a rendus plus ou moins directement
à la science.
L'empressement qu'il mettait à déterminer
les fossiles que de toutes parts on lui soumettait, la facilité avec
laquelle il ouvrait ses collections à tous les travailleurs, l'importance
enfin des matérieux qu'il communiquait libéralement à tous ceux qui les
lui demandaient, favorisaient singulièrement les travaux des autres.
Quand d'Orbigny, par exemple, allait
aborder l'étude d'une classe de fossiles, il en prévenait Cotteau qui,
immédiatement, se mettait en campagne et lui procurait soit des matériaux,
soit des renseignements stratigraphiques. Le nombre considérable d'espèces
que nous trouvons portant le nom de Cotteau dans les catalogues de
d'Orbigny, témoigne de l'importance des découvertes faites par lui.
C'est à son initiative et grâce à sa
féconde intervention que nous devons beaucoup d'importants travaux sur le
département de l'Yonne, tels que la description des poissons fossiles de
ce département, par M. Sauvage, celle des végétaux des couches
bathoniennes d'Ancy-le-Franc et de notre étage corallien par de Saporta,
le catalogue raisonné des Spongitaires de l'étage néocomien publié, en
1861, par de Fromentel dans le Bulletin de la Société des sciences de
l'Yonne, le mémoire paléontologique de M. de Loriol sur l'étage
portlandien et celui, plus important encore, du même savant sur la faune
astartienne de Tonnerre, ceux de M. Lambert sur le Jurassique moyen et sur
le Corallien de Tonnerre, puis de nombreuses notes d'Hébert, d'Ebray, de
moi-même, etc., sur divers points du département.
J'ai parlé tout à l'heure, au sujet de la
correspondance de Cotteau, des lettres que lui écrivait le professeur
Bayle. Il en est qui montrent d'une façon bien probante avec quel
dévouement notre confrère venait en aide aux études du savant professeur.
Bayle, qui avant entrepris des recherches sur les Diceras, le
conjurait incessamment de lui fournir de nouveaux matériaux. "Il m'en
faut" lui écrivait-il, "1,000, 10,000, 100,000 exemplaires et en grande
vitesse."
Je ne sais au juste si notre ami a pu lui
fournir exactement toutes ces quantités, mai ce que je sais c'est que pour
satisfaire à ces demandes il faisait, à grands frais, fouiller les coteaux
de Coulanges, de Crain et de Merry-sur-Yonne et, si j'en crois certains
accusés de réception qui sont entre mes mains, c'est au moins 602
exemplaires de Diceras qu'il a dû expédier. C'est grâce à ces
envois que Bayle a pu faire connaître l'inattendue diversité de ces formes
spécifiques qui, jusque là, se cachaient sous le nom unique de Diceras
arietina.
Dans une autre circonstance encore, Cotteau
rendit à la science et à notre département un signalé service. Il
s'agissait alors des Polypiers dont nos couches néocomiennes de l'Yonne
renferment de si beaux et de si variés spécimens. Trois spécialistes,
Michelin, Robineau-Desvoidy et d'Orbigny se proposaient simultanément pour
s'occuper de ces fossiles. Michelin voulait les ajouter à ceux des seize
localités déjà comprises dans son Iconogaphie zoophytologique, et
il priait instamment Cotteau, non seulement de lui communiquer ses propres
matériaux, mais d'intervenir auprès de Dupin (d'Ervy) et de Robineau-Desvoidy
pour qu'ils veuillent lui envoyer les leurs.
D'Orbigny, de son côté, les réclamait
également. Il fit même le voyage de Saint-Sauveur et d'Auxerre et se
plaignait amèrement à Cotteau que Robineau-Desvoidy n'avait voulu rien lui
donner, rien lui prêter et à peine même le laisser chercher lui-même.
Cotteau, embarrassé par ces compétitions,
se multipliait pour satisfaire tous ses correspondants. Il faisait dans
nos environs des recherches et même des fouilles onéreuses et parvint
ainsi à réunir une quantité considérable de Polypiers.
Il arriva cependant que Michelin, n'ayant
pu obtenir tout ce qu'il désirait, renonça à les décrire ; Robineau-Desvoidy
ne les décrivit pas davantage ; d'Orbigny, dans son Prodrome, en mentionna
et en nomma un grand nombre, mais il ne put ni les décrire, ni les faire
figurer.
Ce ne fut que dix ans plus tard, seulement,
qu'un quatrième savant, de Fromental, entreprit enfin ce travail. Son
mémoire : Description des Polypiers fossiles de l'étage néocomien,
fut publié, en 1857, dans le Bulletin de la Société des Sciences de
l'Yonne. Il embrasse 105 espèces, dont beaucoup portent le nom de notre
ami et il lui était dédié. Cette dédicace est trop à son honneur pour que
je ne la reproduise pas ici.
" A Monsieur Cotteau,
Monsieur, le département de l'Yonne, qui
vous doit un important travail sur les Echinodermes, vous a révélé des
richesses zoophytologiques d'autant plus précieuses que la plupart des
fossiles que vous avez découverts appartiennent à des espèces nouvelles et
non décrites.
Vous avez eu l'extrême obligeance, sachant
la part active que je prends à l'étude des Zoophytes, de m'envoyer votre
belle collection de Polypiers néocomiens et je me fais un devoir d'en
publier la description dans le Bulletin de la Société du département de
l'Yonne qui en a fourni la plus grande partie.
Croyez, Monsieur, que je n'oublierai jamais
les excellentes relations que nous avons eues ensemble, et veuillez agréer
la dédicace de cet ouvrage comme un faible témoignage de mon affection et
de ma haute estime.
Gray, 12 décembre 1856.
De Fromentel.
"
XIII
Tous ces services rendus à la science, tous
ces travaux personnels si appréciés du monde savant, n'ont pas manqué
d'attirer à Gustave Cotteau de nombreuses et de hautes distinctions
honorifiques.
S'il a beaucoup travaillé, il a aussi
beaucoup connu les joies du succès et le bonheur de voir le produit de son
travail apprécié à sa juste valeur.
Dès le 26 août 1858, il a été nommé
correspondant du ministère de l'instruction publique.
En 1861, aux réunions des sociétés savantes
de la Sorbonne, il a obtenu une médaille de bronze, puis, en 1863, une
médaille d'argent et, en 1867, une médaille d'or.
Le 10 août 1864, il reçut les palmes
d'officier d'Académie et, le 25 mars 1876, celles d'officier de
l'instruction publique.
Dans l'intervalle, le 3 août 1869, il avait
été nommé chevalier de la Légion d'honneur.
En 1882, il fut nommé conservateur du musée
de la ville d'Auxerre.
En 1884, l'Académie des Sciences lui a
décerné le prix Vaillant de 2.500 francs, pour ses recherches sur les
Echinides fossiles.
En 1885, le 12 juillet, le Société libre
pour le développement de l'instruction et de l'éducation populaire lui a
décerné une médaille d'honneur pour ses nombreux travaux d'anthropologie
et d'archéologie.
L'Académie des Sciences l'a, en 1887, élu,
au milieu de nombreux candidats, membre correspondant pour la section
d'anatomie et de zoologie, et nous avons rappelé plus haut en quels termes
élogieux M. E. Blanchard, l'éminent rapporteur de la commission, avait
fait valoir ses titres à cette haute distinction.
Le 25 novembre 1891, la Société géologique
de Londres lui a fait l'honneur, si recherché, de l'élire membre étranger
en remplacement d'Hébert, le savant et regretté professeur de la Sorbonne,
que nous nous honorons de compter parmi nos compatriotes et parmi les
anciens élèves de notre collège.
En 1893, l'Académie de Dijon lui a décerné,
pour ses beaux travaux, la plus haute récompense dont elle dispose, la
médaille d'or.
Si, enfin, nous rappelons qu'à chacune des
expositions universelles de 1867, de 1878 et de 1889, Cotteau avait obtenu
une médaille d'honneur pour sa coopération à leur organisation et pour ses
expositions personnelles d'objets d'art et d'archéologie préhistorique,
nous en aurons à peine terminé avec la longue nomenclature des récompenses
qui lui ont été décernées, car il faudrait évidemment ranger encore parmi
les plus hautes récompenses l'honneur qui lui a été dévolu à plusieurs
reprises de présider de grandes sociétés scientifiques.
XIV
Presque toutes les grandes sociétés
savantes de la France et de l'étranger se sont fait un honneur de compter
Gustave Cotteau parmi leurs membres. Nous en donnons ci-après, avec
l'époque de son admission, la liste telle que nous avons pu l'établir
d'après les lettres ou les diplômes que nous avons entre les mains.
Peut-être en avons-nous omis quelques-unes ? Que ces sociétés veuillent
bien nous excuser et n'attribuer cette omission qu'à l'absence
d'indications suffisantes.
Parmi ces sociétés il en est quelques-unes
qui réclament une mention spéciale en raison de la situation importante
que notre confrère y a occupée.
C'est tout d'abord notre Société géologique
de France, dont Cotteau était membre depuis plus de cinquante-quatre ans.
C'est en effet, le 16 décembre 1839, alors
qu'il était encore étudiant à Paris, qu'il y fut admis sur la présentation
de La Joye et de Constant Prévost.
De cette époque lointaine et brillante de
la Société, où le siège de la présidence était occupé par des savants tels
que Brongniart, Constant Prévost, Elie de Beaumont, Alcide d'Orbigny,
d'Archiac et tant d'autres non moins illustres, bien peu de membres
subsistent encore parmi nous. Avec Cotteau nous avons eu le regret d'en
perdre deux dans le courant de cette année, MM. Loustau et de la Sicotière
et actuellement, trois seulement nous restent, qui sont plus anciens que
lui dans la Société. Ces vénérés confrères, que je veux saluer ici, me
pardonneront, j'espère, de citer leurs noms. Ce sont : M. Parandier, notre
doyen, entré dans la Société en 1833 ; M. Victor Raulin, admis en 1837, et
enfin M. Daubrée, admis, comme Cotteau, en 1839.
En 1874, Gustave Cotteau, quoique ne
résidant pas à Paris, eut l'honneur d'être élu président de la Société. Le
même honneur lui fut encore attribué en 1886, et tous nos confrères ont
gardé le souvenir de la courtoisie, de l'autorité et de la haute
compétence avec lesquelles il dirigeait nos discussions et présidait à nos
séances.
Depuis longtemps il était membre à vie de
la Société. En raison du legs qu'il lui a fait et en vertu de notre
règlement, il doit devenir membre à perpétuité. Son nom continuera à
figurer parmi les nôtres, et ce sera toujours avec un bon souvenir que
nous le lirons en tête de nos listes.
Une autre Société dans laquelle Cotteau
occupa une situation plus considérable encore, est notre Société des
Sciences historiques et naturelles de l'Yonne. Il en fut, en 1847,
l'un des membres fondateurs et l'un des organisateurs. Le premier Bulletin
de cette Société contient déjà quatre notes scientifiques de lui et,
depuis cette époque, pas un des volumes ne fut publié sans qu'il y fît
insérer quelques mémoires.
Successivement secrétaire, puis
vice-président pendant quinze années consécutives, il fut élu président,
en 1883, lors de la mort d'Ambroise Challe et, à dater de ce jour, il ne
cessa, jusqu'à sa mort, d'être constamment réélu.
Cotteau était vraiment l'âme de cette
Société, qu'il affectionnait tout particulièrement, et il a beaucoup
contribué à en faire l'une des plus actives, des plus laborieuses et des
plus considérées qui soient en France. C'est à elle qu'il réservait tous
ces comptes rendus des congrès internationaux ou autres, des réunions
savantes de toutes sortes qui, comme il l'a dit lui-même, avaient pour but
de populariser les idées scientifiques, et de tenir la Société qu'il
présidait au courant du grand mouvement intellectuel et des découvertes
zoologiques, géologiques et archéologiques de notre époque.
Sa perte a été profondément ressentie dans
cette Société, et les témoignages touchants d'affection et d'admiration,
qui lui ont été donnés, lors de sa mort, par les vice-présidents, étaient
bien réellement la traduction des sentiments unanimes de tous les membres.
Parmi les grandes sociétés où Gustave
Cotteau remplit également un rôle important, il faut citer encore l'Association
française pour l'avancement des Sciences, aux congrès annuels de
laquelle il assistait régulièrement, où il fit des conférences publiques
et où le plus souvent il présidait la section de géologie ; puis la
Société zoologique de France dans le Bulletin de laquelle il publiait
annuellement ses fascicules si intéressants des Oursins nouveaux ou peu
connus et dont il fut élu président pendant l'année 1889 ; puis enfin, l'Institut
des provinces, où il entra comme membre titulaire le 25 avril 1859, et
où sa situation sans cesse grandissante devint bientôt une des plus
considérables.
Elu secrétaire le 23 avril 1865 pour la
section des sciences, il devint dans la même année président de cette
section et, le 14 février 1868, il était nommé secrétaire général de la
Société.
Ses communications, notamment ses rapports
sur les progrès de la géologie en France, étaient, comme je l'ai dit, un
des principaux attraits des congrès scientifiques annuels que l'Institut
des provinces organisait dans les principales villes de France et aussi
des réunions de délégués des Sociétés savantes qu'il dirigeait, qu'on
appelait aussi le Conseil général des Académies et qui se tenaient alors
dans la rue Bonaparte pendant les vacances de Pâques.
Les nombreuses lettres que de Caumont, le
directeur de l'Institut, lui écrivait sans cesse, témoignent toutes du
rôle important de notre confrère pour l'organisation de ces congrès et de
ces réunions.
Je n'en veux citer qu'un court passage qui
suffit à les résumer toutes. "Votre lettre m'inquiète, " lui écrivait-il,
le 18 juillet 1870, "que ferons-nous sans vous ? Comment trouver un
président pour l'histoire naturelle, si votre mal de pied vous arrête le
31 juillet ? Je suis dans l'anxiété et j'attends de meilleures nouvelles."
XV
Comme on le voit, la vie de Gustave Cotteau
a été partout et toujours bien remplie par le travail. Ceux qui ne le
voyaient que dans l'une de ses sphères d'action ne pouvaient se rendre
compte de la somme énorme d'activité et de labeur qu'il dépensait.
C'est à le montrer à tous, c'est à mettre
en lumière ce dévouement de tous les instants, ce labeur ininterrompu que
la présente notice est destinée.
Notre ami regretté, au surplus, ne s'est
pas contenté de bien mériter de la science de son vivant, il a voulu
encore la servir même après sa mort par ses libéralités et par les
dispositions testamentaires qu'il a arrêtées.
Ces dispositions, vous les connaissez déjà.
Il a légué 3.000 francs à la Société géologique et 3.000 francs à la
Société des Sciences de l'Yonne.
Ses précieuses collections d'histoire
naturelle sont conservées à la science. Sa bibliothèque seule va être
dispersée et rentrera dans le fonds commun et dans la circulation
générale.
La collection d'Echinodermes de l'époque
actuelle a été léguée au Muséum d'histoire naturelle, qu'elle a enrichi de
nombreuses espèces que ne possédait pas encore notre grand établissement
scientifique.
La collection d'Echinides fossiles, la plus
importante de toutes, a été léguée à l'Ecole des Mines où, réunie à la
collection Michelin, elle va, comme le disait récemment le savant
directeur de l'Ecole des mines, M. Haton de la Goupillière, constituer un
ensemble hors de pair, avec lequel il sera difficile à tout autre musée de
rivaliser.
La collection de conchyliologie n'a pas
encore reçu d'affectation.
Quant à la collection considérable de
paléontologie stratigraphique que Cotteau avait réunie, comme elle
intéresse tout particulièrement le département de l'Yonne, c'est à un
compatriote qu'il a jué bon de la léguer. C'est à Auxerre que je l'ai
installée, et que je vais la réunir à celle non moins considérable que
j'amasse moi-même depuis 40 ans et qui la complètera très heureusement par
l'adjonction de lapaléontologie de nombreuses régions que notre confrère
n'a pas eu l'occasion d'explorer.
Mon âge, malheureusement, ne me permettra
pas de tirer tout le parti utile de cette collection de Cotteau, mais,
conformément aux idées et aux habitudes de notre ami regretté, elle
continuera à rester largement ouverte à tous les travailleurs qui voudront
l'utiliser. Tous ceux de nos confrères qui, n'ayant pas oublié le chemin
d'Auxerre, voudront y venir puiser des matériaux d'étude, seront toujours
les bienvenus.
Ils y trouveront partout le souvenir de
leur ami et, passant devant sa maison aujourd'hui déserte sur laquelle ils
jetteront un regard attristé, ils pourront aller, non loin de là, dans ce
cimetière où il repose auprès de ceux qui lui furent chers, saluer la
tombe de ce grand homme de science et de ce grand homme de bien qui fut
Gustave Cotteau.
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LISTE DES SOCIETES SCIENTIFIQUES DONT
FAISAIT PARTIE GUSTAVE COTTEAU
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LISTE CHRONOLOGIQUE DES TRAVAUX
SCIENTIFIQUES PUBLIES PAR GUSTAVE COTTEAU
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